L’usage de la carte postale était quotidien au courant des années 1900-1920. Ces cartes ont circulé par millions dans le monde entier. Elles ont aidé la photographie à se diffuser dans toutes les sphères et à raconter leur époque. C’était le moyen le plus courant pour correspondre et communiquer. Les femmes se sont tout naturellement retrouvées comme modèles sur ces supports. L’usage qui en a été fait a été tout à fait particulier pendant la période coloniale. Selon Christelle Taraud la « Mauresque aux seins nus » – objet offert, objet achetable – est en effet pensée comme l’antithèse de la femme voilée, toujours perçue comme inaccessible ; mais aussi, d’une certaine manière, comme la figure antithétique de la femme mystérieuse, sacrée et adorée (Odalisque, Almée, Ouled Naïl…) de la première phase de la colonisation française. Elle ajoute : « Par ailleurs, la carte postale coloniale repose aussi sur une construction « ethnique » de l’altérité féminine. Censées être « Arabes », « Berbères », « Juives » ou « Négresses », les femmes représentées ne le sont évidemment pas toujours. On mesure l’aspect fantaisiste de la classification en apposant, côte à côte, certaines images. Une même femme et plusieurs légendes différentes – faisant d’elle tantôt une Arabe et tantôt une Juive, tantôt une paysanne et tantôt une citadine, tantôt une danseuse et tantôt une tisseuse – montrent la manipulation.» Même si ces photographies n’étaient pas destinées aux colonisés, on peut se demander quel fut l’impact de ces images, et s’il est possible d’en repérer les effets au fil des générations. RÉALISATION 2001.
DIALOGUE avec Christelle Taraud, In “Prostitution coloniale